Je connus Paul et sa bonhomie au festival « Parole ambulante » où le pianiste Alain Bréheret et moi nous participions à Lyon ainsi qu’une brochette d’auteurs (Kenneth White, Marie Bélisle, Fabienne Swiatly, Alessandro Perisinotto…). Il venait du Québec où il est le plus important éditeur de poésie. J’ai découvert un poète, un de ceux qui ne chantent pas pour passer le temps. Ses textes m’ont secoué. Pointus comme des coups de semonce et aussi arrondis par l’humanité. Pas de préciosité mais des mots pesés au trébuchet ou bien plaqués tels quels pour dire cet être au monde, le même au fond – à ce que je lis – par-delà l’océan et hors la météo. Présomptueux de critiquer le poète. Je lui laisse la parole : « Il ne reconnaît plus rien / et mesure mieux ce qui le sépare / d’une mémoire plus antique ». « Je suis vide dit-il il y a trop de bruit en moi. » «  Si près du néant si bien / que la mort tu l’entends respirer ». Il dit pourtant aussi l’espoir : « Tu n’es jamais si loin / de parler avec le ciel bleu / pas d’autres voies que les mots ». Écriture malgré tout et sur tout : « mon histoire histoire d’occuper le jour / de comprendre l’arrière des façades ». Une écriture clairvoyante, solide et noueuse comme des aphorismes : « tout homme n’a devant lui / que son reflet à contempler […] tel qu’il est sans projet / et sans futur agité seulement par l’instant ». « quel sillage mènera donc jusqu’au jour suivant ». Merci, Paul !