Depuis des années Philippe anime avec succès un club d’écriture et de lecture à Montgiscard, lequel doit – j’imagine – compter dans le succès du salon du livre annuel dans ce village du toulousain. Il se trouve que le susdit écrit lui-même. Son second recueil de nouvelles ne semble guère se prendre au sérieux et pourtant, il moque, égratigne, voire récuse. C’est écrit de manière incisive et à la fois avec recul : « L’annonce était benoîte. Elle proposait, dans un journal de bonne réputation, d’exaucer notre vieux rêve, largement partagé tout au long de l’histoire de l’humanité, de voler. » Ces manières d’oxymore, frôlant parfois la valse hésitation stylistique, m’ont d’abord, je l’avoue, déconcentré avant de m’embarquer dans de petites aventures rocambolesques. Il y a donc l’homme à la greffe de « prothèses alaires », la truite nourrie aux hormones qui devient titanesque, l’assassiné par son propre bras greffé, la femme difforme (ou qui se trouve telle au regard des canons ambiants) se faisant ôter les surplus et recoudre… mal sans doute car elle finit par prendre l’eau comme une éponge, et bien d’autres. Ces textes ne sont évidemment légers qu’en apparence. En témoignent les thèmes : le rêve de vol, la femme et son apparence physique, le PDG et son employé : « J’épuisais mes forces dans les usines de ce pourceau jouisseur. », l’hôpital psychiatrique, etc. Avec quelques coups de pieds savoureusement ambigus : « il vous balance en trois phrases que Freud était aussi névrosé que ses patientes, que Lacan est un égocentrique abscons et Reich un marxiste dépravé ». On sait qu’en France, le marché des nouvelles est à l’étiage. Alors, prenons pour l’hiver, en guise de potion roborative, quelques uns de ces textes vifs et concis. Nous en serons moins moutonniers qu’en achetant le dernier best seller décrété tel avant même sa parution.

* Editions La Girandole : BP 5, 81220 GUITALENS-L’ALBAREDE