L’auteur est un des rares journalistes toulousains à lire vraiment les livres. Je lui ai rendu la politesse avec son roman qui évoque un épisode particulier. Un jeune couple de toulousains se rend en voyage en URSS en 1934 avec tout un groupe. Ce couple est de sensibilité socialiste, lui surtout : « Quand il avait dix-sept ans, Kleber voulait être Saint-Just ou mourir ». Socialisme d’époque, plutôt rouge que rose. Les temps changent… Et le couple découvre passions et aussi défauts de cette immense nation naissante. Voici qui est passionnant, non ? La curiosité n’étant pas la chose du monde la mieux partagée, le livre n’a pas rencontré grand écho dans la ville rose. Question de couleur actuelle ou bien de l’atmosphère, parfois fétide, en France d’époque, qui est évoquée? Un des personnages du genre Camelot du roi tient des propos qui iraient aujourd’hui dans la bouche d’un membre du FN : « Mon pays est une vieille femelle vulgaire et avachie. Ce qu’il lui faut, c’est une morale et une passion, une révolution de l’ordre. » Bien m’en a pris de lire ! Car l’information historique est conjuguée avec une facture non classique, parfois un peu débridée d’ailleurs, mais souvent d’authentique émotion. Dans ce voyage, le couple vivra la tempête et l’homme se laissera aller à une amourette pour la jeune guide. Métaphore d’un béguin pour la jeune république socialiste… Tandis que divers tableaux du temps défilent en toile de fond, le fameux « Arc des soviets » élevé à la frontière entre autres. Extrait d’un carnet du journaliste : « Devant l’Opéra de Moscou, dans un jardin, on a disposé des drapeaux d’égale grandeur sur lesquels se déversent des flots de lumière écarlate. Sur la façade d’un club de l’Armée rouge, ruisselante de feu, on a inscrit en lettres de néon l’appel désormais célèbre des travailleurs : « Rot Front ». Je ne vous dis rien de passages chauds où l’auteur se lâche. On envie son héros vu par les yeux de sa compagne amoureuse : « Mathilde le trouvait irrésistible. Entre les draps. Marchant dans la rue. Rongeant l’os des gigots. À la tribune des réunions. Écrivant à sa table […] » Le veinard !