Beau livre au sens propre, que ce roman d’un auteur mûr, plein de recul et à la fois toujours passionné. Le personnage souffre de la séparation avec la femme de sa vie et fond à la vue des fesses de sa jeune voisine solitaire, tout en la respectant et même en repoussant ses avances oedipiennes. De quoi rester rêveur et réfléchir sur la moralité qui criminaliserait vite tout ça… Ce flic à la retraite garde son réflexe d’enquêteur devant une affaire de gourou d’une secte rançonnant et grugeant tandis qu’il se heurte aussi à des mafieux en un monde non seulement sans pitié pour les petits mais encore inhospitalier. Pourtant l’auteur se trouve chez lui dans la nature sauvage et inhospitalière du Nord aux Grands lacs, qu’il décrit si merveilleusement qu’on l’aime. De quoi rester pantois en cette lecture qui relègue bien bas nos commerciaux thuriféraires de petits états d’âmes quotidiens. En donnant raison à Victor Hugo : « En littérature, je suis pour le grand contre le petit, et, en politique, je suis pour les petits contre les grands. » Pour moi, nationaliste en littérature parce qu’amoureux de la langue, je crains les traductions. Mais pas ici : « solstice d’hiver, quand une minute ou deux de soleil en plus aidaient l’âme à espérer de nouveau. » À l’évidence, la classe du traducteur (Brice Matthieussent) est à la hauteur de celle de l’auteur. Chapeau les artistes.