C’est un roman d’anticipation ou dystopique, comme on dit aujourd’hui où l’utopie est reléguée dans ses derniers retranchements. Pas pour longtemps, peut-être. Nous voici transportés sur une planète rongée par un crépuscule perpétuel où l’on ne peut survivre sans une matière précieuse, tandis que des êtres sont asservis au moyen de la religion. Espérons qu’il ne s’agit pas d’une prédiction, mais quand même, tout cela prête à songer…

Il faut entrer dans ces mots comme dans un poème. Car ce livre est bien un poème. Il en a les limites et les qualités. L’auteur a fait là un travail, plutôt une création vertigineuse, brossant l’image d’un monde cramé et sauvage glacial et sanguinaire, scandant des mots puissants, parfois étranges, doués d’une capacité suggestive admirable, à en être presque jaloux.

Voici un monde primitif ou retombé en sauvagerie, où même l’amour est toujours perdu quand il n’est pas violé. « … de cet humus de chair, de sang et de poussière pouvaient jaillir des bourgeons de pus qui les feraient pourrir de la tête aux pieds. Les herbes qui jadis guérissaient les purulences avaient disparu du paysage… » Il y a bien des évocations de la « flamme », synecdoque de l’amoureux qui peut être béni et bénissant, figure de style bien vite dégonflée chez ces êtres réduits à l’esclavage à quatre pattes. Claudine a trouvé un éditeur intelligent et sensible, mais elle en est comme la plupart d’entre nous, en manque de diffusion et de renommée. Bienvenue au club !