Lire la poésie de Bardou (Fòc als uèlhs ai set de brasas en occitan), c’est un coup de fouet, tant il ravive la conscience, hélas anesthésiée, du temps présent : « Nous n’entendons qu’un chant d’esclaves / Contents d’aller gagner leur soupe… ». Ses mots illuminent là où la maladie du sommeil règne, notre monde, et ce dans une langue morte – heureusement traduite – sinon pour quelques dinosaures. Cette langue occitane des troubadours, qui apprit l’amour à l’univers pour les siècles des siècles, luit donc dans ce recueil bilingue : « Vèlha tostemps, ma doça, a l’amor sempre vèlha […] (Veille toujours, ma douce, à l’amour toujours veille […]». La force et la valeur de ce poète est de ne pas s’abandonner à la nostalgie du temps des grand-mères sudistes, en formulant au contraire l’avenir, sombre sous les clinquants. Il chante de même les douleurs et exultations de l’amour, ce terme occitan passé dans la langue française. La passion, seule valeur de vivre : « La souffrance en chemin s’efface / devant la loi d’amour d’aller se perdre en elle […] (Lo patir sul camin s’escafa / davant la lei d’amor de s’anar pèrdre en ella […] ».
Gérard Zuchetto : spécialiste, chanteur et promoteur des troubadours classiques, fait aussi office d’éditeur avec l’ambition de faire connaître également des troubadours du 21ème siècle. Il édite celui-ci dans une collection Votz de trobar de très beaux livres illustrés et présentés luxueusement. Merci les artistes.