Dans la collection intitulée chez Ska – non sans esprit – « Culissime », j’ai été emballé par ce texte de femme, d’amoureuse et d’auteure. Je déroge donc encore à ma règle en chroniquant cette nouvelle (courte et en édition électronique) en plus d’un roman du même auteur. Il s’agit d’une fille qui va la faim au ventre : un « furet » dormant dans l’estomac, comme en est filée la métaphore si évocatrice. Une histoire non pas de Grands ni de petits, ordinaires, mais de ceux qui se sont noirci la plante des pieds sur le trottoir et dont la crinière est mal démêlée, et à la fois une aventure d’amoureuse folle à ne pas louper l’épice et la chair de la vie. Elle offre d’abord sa chatte à Rémi, qui a les moyens de calmer le furet et aussi les sens de la belle, mais elle va le congédier brutalement, sauvagement, même, dans ce monde aux « truands qui avaient relooké le dieu pognon ». Le répudié est vieux, seule réserve que je ferais à ce beau texte (même si, à la réflexion, le type est riche) qui se poursuit par un feu d’artifice sensuel, boulimique même, avec un jeune émigré de passage, élu amoureux (même réserve, quoiqu’il soit pauvre…). La pauvreté d’Ifser sent bon et la fille s’ouvre tout grand. Quelle folie d’amour, quelle écriture ! La rue à « l’odeur triviale de graillon, de linge chaud et d’essence ». La rencontre : « Sa tête sentait comme la laine. » Le comble : « elle s’assoupissait gavée d’homme jusqu’aux yeux, les muqueuses épanouies, cirées, gonflées, vermeilles ». La folie : « et que c’était bon, bon, bon, et il la fendait aimablement jusqu’au plexus ». Qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas là gaudriole, mais bien tragique, ou bonheur. Amour, valeur suprême trop perdue aujourd’hui, retrouvée dans cet épisode marginal. « Elle ne trouva pas une parcelle de lui où elle n’eût pas envie de s’enterrer vivante ». Dans la touffeur ou un orage de cet été, je vous souhaite un beau temps à lire ces beaux mots.

*accès à cette nouvelle et aux autres (0,99 cts d’euro chacune) par le lien :http://skaediteur.net