Rencontré au salon de La Ferté sous Jouarre, Patrick m’apparut vite en aventurier vrai, de ceux qui ont du cœur. L’homme fut bien en place dans l’édition où, sauf erreur, il découvrit rien moins que Raynal, Pouy, Jonquet… fondant à ce qu’on dit le « néo-polar ». Il fut également scénariste et auteur. Mais il tranche dans le milieu prévisible de l’édition. Ni tâcheron commercial, ni courtisan campant au quartier latin. Emule et héritier de Guy Debord, si j’ai bien compris, il accomplit des virées vers les indiens, tout sauf touristiques*. Car l’homme qui écrit aussi pour la jeunesse a du ventre. Il n’écrit pas pour passer le temps. Pas de sang et de noir à la mode. Des livres courts, coupants, comme des cris. Des livres aussi en hommage, en héritage, à Jonquet, Debord, et autres. En mémoire et défense des indiens, surtout. Même des « indiens » d’ici que sont les SDF. Seule la lie de ces caves, outre l’art du titre, nous emporte dans une histoire banale et hors limites. D’abord un prologue où un gamin est enlevé… Banalité sublimée : « Notre besoin de consolation est impossible à rassasier. » Quand un journaliste cherche un trafic de drogue, il trouve une « femme défaite ». Au lieu de traiter un « papier », il se met à la voir et à l’abreuver. Comme elle est lourde, la vie jouée alors. Et comme elle est épaisse, l’écriture chargée qui la rend : « Montcorbier ne peut s’empêcher de se demander si le policier fatigué est de la race de ceux qui raflent au Vel’d’hiv et jettent en octobre des cadavres dans la Seine. »  Je parlais d’un homme de cœur. Il faut dire aussi homme d’écriture. Une patte personnelle, à la fois dessinée et tranchée, pour des tableaux à vif : « Elle boit, et lui cherche à s’insinuer derrière ces yeux qui disent le néant. / Lui qui cherche à comprendre pourquoi il se trouve là. / Elle qui hurle en silence. » Pour finir, le flic clément lui apprendra qu’elle est « femme défaite »… depuis l’enlèvement de son fils. Un beau livre.

* Dont L’Agonie de Geronimo, Jean-Paul Rocher éditeur.