On sait malheureusement que dans de nombreux EHPAD (Etablissement Hébergeant des Personnes Agées Dépendantes) l’épidémie de Covid est terrible du fait des risques encourus par les personnes âgées et de l’insuffisance de moyens de protection, suite à une pénurie nationale.

J’ai contacté « Les Tilleuls », situé à Saint-Cyprien, à côté de l’hôpital Joseph Ducuing. L’ EHPAD fut créé et reste géré comme l’hôpital par l’AMS (association des Amis de la Médecine Sociale). Agréable surprise, à ce jour aucun résident de l’EHPAD de 80 chambres n’est malade. Il faut dire que dès début mars on y a mis en œuvre les mesures de protection pour le personnel, les résidents et les personnes extérieures : prise de température, port du masque, lavage des mains, respect de la distance d’un mètre.

Je rappelle que l’Hôpital Joseph Ducuing et l’AMS sont héritiers d’un passé particulier que j’ai déjà évoqué à cette antenne. Créé à l’origine par des médecins républicains espagnols, l’hôpital fut ensuite un lieu de médecine sociale et éclairée. Sans doute la situation actuelle est-elle moins grave en Occitanie que dans le Nord-Est. Peut-être aussi qu’un certain esprit associatif permet aujourd’hui de faire face au mieux à la pandémie. On le souhaite en tout cas. Car il va falloir prochainement s’inspirer de tout le bon dans la santé publique afin de la tirer du mauvais pas où l’ont plongée, certes la pandémie, mais encore une impréparation catastrophique laissant désarmé face à la catastrophe.

La fatalité fit s’abattre le fléau particulièrement sur les EHPAD où l’on compte de nombreux malades et bien trop de décès. Du coup, cela invite à réfléchir au sort des anciens. On sait que, afin de faire face au choc attendu par suite de l’épidémie, les visites extérieures, même celles de la famille, furent proscrites dans les EHPAD. Non seulement on put noter que l’isolement pouvait aggraver l’état des malades, mais encore on enregistra de terribles décès dans la solitude, évidemment cause aussi de souffrances psychiques pour la personne et la famille.

Des rumeurs ont couru sur l’obligation de faire un choix pour donner le traitement nécessité, en délaissant ceux dont l’espérance de vie serait plus faible. On entendit en outre gloser sur la catégorie particulière des vieux, plus fragiles et proies appréciées du virus qui seraient donc contaminants en puissance. Enfin, on se prit à suggérer que ces personnes devaient être l’objet d’un « confinement discriminatoire ».

Un bruit a même circulé selon lequel on aurait autorisé les médecins à pratiquer l’euthanasie de certains malades âgés. Mais où en est-on, alors que l’Association pour le Droit à Mourir dans la Dignité dont je fais partie, se voit depuis longtemps opposer un refus d’inscrire dans la loi le droit de disposer soi-même des moyens de sa propre fin ? Se souvient-on que l’on isolait jadis les lépreux, à vie – si l’on peut dire – dans des établissements situés loin de la ville et interdits aux autres ? Alors, je crois qu’il faut raison garder.

Ma fille aînée, médecin, me disait récemment : « faire peur est le meilleur moyen de tenir en laisse ! » Le mode de pensée sous-tendant le libéralisme actuel, répand depuis longtemps une idéologie jeuniste où la jeunesse est considérée comme un capital. Est-ce ainsi que de jeunes femmes doivent se vendre comme carcasses de viande ? Et la vieillesse ne serait au contraire qu’un mal ? Comme si le fait d’avoir un président jeune nous mettait à l’abri d’une gouvernance imbécile ! Si mes souvenirs d’étudiant sont exacts, les grecs anciens ne s’y trompaient pas, qui voulaient que l’on eût au moins un grand âge pour être élu, alors que l’espérance de vie était alors bien faible.

A-t-on déjà oublié que rien ne sert de juger sur la mine ? Et que, comme écrivait Rousseau : « La jeunesse est le temps d’étudier la sagesse, la vieillesse est le temps de la pratiquer. » Un humaniste rappelait dernièrement à la télévision, que toute mesure et déclaration discriminatoire est non seulement inhumaine, soit contraire aux droits de l’homme, mais encore condamnable au regard de la loi.

Pour finir tout de même dans un sourire, étant donné les statistiques établissant que le nombre de morts des personnes de sexe masculin est très nettement supérieur à celui des personnes de sexe féminin, imaginons nos gouvernants mâles apprenant qu’à partir du 11 mai resteront confinés tous les hommes de plus d’un certain âge…