J’avais particulièrement aimé Les 1001 années de la nostalgie et Timimoun. Un ami m’ayant questionné sur  Le Démantèlement, je viens de m’y plonger. J’avoue avoir peiné comme les héros y peinent à y décrypter la mémoire. Il est des livres qui ne cherchent ni à rassurer ni à distraire. « Je suis plus réaliste avec mes phrases de 8 pages que ceux qui écrivent avec Sujet, Verbe, Complément ! », déclarait l’auteur en présentant récemment sa dernière parution (Le Figuier de barbarie) à la librairie Ombres blanches. Dans cette écriture dont la puissance est qualifiée parfois de  « cinématographique », se succèdent descriptions, cuts, champs et contrechamps, dialogues hors champs, etc. La démarche me rappelle le « Nouveau roman »,  pas loin encore à la parution du livre (au tout début des années 80), avec ses mérites et peut-être aussi ses manques, privilégiant une science du regard ou de la pensée au détriment de la poésie, trop rare à mon goût : « On aurait dit à ce moment-là que son visage s’était recouvert de cette poudre safranée que laissent les papillons de la mélancolie sous les doigts de celui qui la tient. » Mais quel monument ! On y découvre des faces cachées de l’histoire véritable traquée au-delà des silences et langues de bois, avec un souci de véracité tel que l’écrivain communiste va jusqu’à mettre à jour des erreurs des camarades algériens durant la guerre. La première : « Pourquoi vous n’avez pas pris l’initiative d’allumer la mèche de la guerre avant tout le monde ? Pourquoi ? N’était-il pas là le rôle d’un parti qui se disait d’avant-garde ? » Et surtout un leitmotiv sur la vision arrangée de l’histoire : « Comment l’ombre peut-elle être droite quand le pilier est tordu ? » Symbole qui revient tout le long du livre, inadmissible pour le matheux philosophe. Comme le révoltent « les siècles de la décadence ! Merde ! Merde ! Écoute, notre littérature s’est émasculée, notre musique frelatée, notre identité a été expropriée. » Et de citer (en arabe), des vers d’un poète persan, qualifiés d’ « obscènes ». En Occitanie, après les troubadours, on dit : « érotiques »…