Le 23 mars 2020, au début du confinement décrété obligatoire, la Bourse du travail hébergeant RMP (Radio Mon Pais), était fermée place Saint-Sernin et le studio évacué. Pourtant l’émission EDVI (« Excusez moi de vous interrompre ») ne s’interrompait pas, grâce au dévouement et à la compétence du technicien Michel Furios et à la ténacité des chroniqueuses et chroniqueurs qui se mirent à enregistrer à domicile.

En 1980, une radio pirate baptisée RMP, était créée par une petite équipe, dans le mouvement de libre expression des années 70. Une ordonnance de 1945 avait établi le monopole d’État et, comme on dénonça en 68 que la radio nationale fût « la voix de son maître », entre 1984 et 1986, la gauche et la droite firent passer l’appareil des mains de l’État aux mains d’acteurs privés. Avec la télévision, l’information devenait ainsi le plus formidable intrument de pouvoir, au service des propriétaires et accesoirement de leurs alliés politiques.

Jaillirent des idées et tentatives de radios et même de télévisions locales et de quartier, qui firent parfois florès avant de faire long feu, telle « Lorraine cœur d’acier » à Longwy ou TSF que je connus et pratiquai à Vénissieux. Ainsi résistèrent de nombreuses radios « libres » qui se virent imposer bientôt une réglementation. Radio Mon Païs, installée officiellement à Toulouse sur la bande FM depuis novembre 1982, a une zone de diffusion hertzienne qui s’étend sur environ 60 kms autour de Toulouse.

Pour une appropriation des moyens de diffusion des idées et de la parole, ce média a été porté dès le début par l’engagement d’une organisation syndicale, la CGT. Radio associative, elle se veut « militante, non seulement pour les droits de l’homme, des travailleurs, mais aussi depuis longtemps pour la diversité musicale, culturelle et la prise en compte des différences. »

C’est à ce titre qu’elle comprend dans sa grille EDVI qui fut animée, avec l’aide musicale et technique de Michel déjà cité, par Jo Péron à l’origine, puis assumée de nombreuses années par Michel Lafarge et poursuivie ensuite par Maxime Vivas. On ne compte plus les belles pages dites à ce micro, ni les nombreux beaux invités qui s’assirent parmi nous. Je n’en veux citer qu’un, le poète Gilbert Baqué, déclarant : « J’ai écouté le monde ».

Étrange mélange depuis l’origine, que ces chroniques et invités qui traitent des événements sociaux et culturels locaux avec entière liberté, voire parfois grande licence. Ce qui est loin d’être le cas de la plupart des radios et télévisions aujourd’hui, que l’on peut éteindre dès 6 h du matin, tant les idées y sont diffusées comme une rengaine journalière universelle émanant de « sources autorisées », les journalistes souvent changés, hélas, en perroquets à la merci comme à la solde de leurs patrons employeurs.

Pour le sourire, on se souvient de Radio Londres et Radio Moscou qui entretinrent l’énergie résistante dans les années 40. Après la nouvelle de la victoire de Stalingrad à l’Est, le message : « Les carottes sont cuites », annonça enfin l’imminence du débarquement à l’Ouest, transformant la pessimiste expression populaire en message d’espoir. Le « on » qui se souvient, est forcément un vieux rescapé de pas mal de tempêtes. Et l’on apprend que la radio peut compter autant que bien des nouvelles inventions techniques. Ainsi que l’a noté l’écrivain Naguib Mahfouz, « Le poète est parti, la radio a pris sa place. »