Il est rare que je reste circonspect dans un roman, sans savoir s’il m’a ou pas intéressé. Il ne m’a en tout cas pas séduit. Dommage, pour une fois qu’un prix Goncourt ne paraît pas se prendre pour chantre définitif du monde ! J’aime bien l’Oulipo présidé par l’auteur, quoique je n’adhère pas à son pessimisme ontologique du : « tout est dit ». Mais je n’ai pas su voir ici de jeu littéraire, si ce n’est de tâcher d’assumer un événement arbitraire, l’atterrissage d’un même vol avec les mêmes passagers à trois mois d’intervalle. Que montre cette histoire, sinon un défilé de petits personnages aux petites histoires ? À quoi conduit l’affaire, sinon à l’intolérable de doubles existences ? Quel est l’intérêt de maquiller les chapitres courts (conformes au format des séries ?) de références pointilleuses, lieux, jours et heures, sinon pour farder l’aventure en polar ? Que les lecteurs aient acheté le livre en masse signifie que l’on ne résiste pas trop mal à la pandémie. Tant mieux, mais que penser de l’attribution d’un Goncourt ? On peut glaner ici ou là quelque indice d’interprétation : « Vivons-nous dans un temps qui n’est qu’une illusion, ou chaque siècle apparent n’est qu’une fraction de seconde dans les processeurs du gigantesque ordinateur ? » Pour moi, cette conscience en désarroi érigée en exercice vaut à peine le temps passé à lire.